domingo, 31 de julho de 2011

L'ETRANGER (1942)


Albert Camus

J'ai résumé L'Etranger, il y a très longtemps, par une phrase dont je reconnais qu'elle est très paradoxale: “dans notre société, tout homme qui ne pleure pas à l'enterrement de sa mère risque d'être condamné à mort”. Je voulais dire seulement que le héros du livre est condamné parce qu'il ne joue pas le jeu. En ce sens, il est étranger à la société où il vit, il erre, en marge, dans les faubourgs de la vie privée, solitaire, sensuelle. Et c'est pourquoi des lecteurs ont été tentés de le considérer comme une épave. On aura cependant une idée plus exacte du personnage, plus conforme en tout cas aux intentions de son auteur, si l'on se demande en quoi Meursault ne joue pas le jeu. La réponse est simple, il refuse de mentir. Mentir, ce n'est pas seulement dire ce qui n'est pas. C'est aussi, c'est surtout dire plus que ce qui est et, en ce qui concerne le coeur humain, dire plus qu'on ne sent. C'est ce que nous faisons tous, tous les jours, pour simplifier la vie. Meursault, contrairement aux apparences, ne veut pas simplifier la vie. Il dit ce qu'il est, il refuse de masquer ses sentiments et aussitôt la société se sent menacée. On lui demande par exemple de dire qu'il regrette son crime, selon la formule consacrée. Il répond qu'il éprouve à cet égard plus d'ennui que de regret véritable. Et cette nuance le condamne.
Meursault pour moi n'est donc pas une épave, mais un homme pauvre et nu, amoureux du soleil qui ne laisse pas d'ombre. Loin d'être privé de toute sensibilité, une passion profonde, parce que tenace, l'anime, la passion de l'absolu et de la vérité. Il s'agit d'une vérité encore négative, la vérité d'être et de sentir, mais sans laquelle nulle conquête sur soi ne sera jamais possible.
On ne se tromperait donc pas beaucoup en lisant dans L'Etrangerl'histoire d'un homme qui, sans aucune attitude héroïque, accepte de mourir pour la vérité.




O ESTRANGEIRO (1942)
Albert Camus

(no prefácio à edição americana do livro, em 1955)


Resumi O Estrangeiro, já faz bastante tempo, com uma frase que reconheço ser bastante paradoxal: “em nossa sociedade, todo homem que não chora no enterro de sua mãe corre o risco de ser condenado à morte”. Pretendo dizer apenas que o herói do livro é condenado porque ele não joga o jogo. Nesse sentido, ele é estrangeiro à sociedade onde vive; ele erra, à margem, nos subúrbios da vida privada, solitária, sensual. E por isso os leitores são tentados a considerá-lo como um arruinado. Ter-se-á contudo uma idéia mais exata do personagem, em todo caso mais conforme às intenções de seu autor, caso se pergunte de que modo Meursault não joga o jogo. A resposta é simples: ele recusa mentir. Mentir não é somente dizer o que não é. É também, sobretudo, dizer mais do que é; e, no que concerne ao coração humano, dizer mais do que se sente. É o que fazemos todos, todos os dias, para simplificar a vida. Meursault, contrariamente às aparências, não quer mais simplificar a vida. Ele diz o que é, recusa mascarar seus sentimentos e imediatamente a sociedade se sente ameaçada. Pedem por exemplo para ele dizer que se arrepende de seu crime, segundo a fórmula consagrada. Ele responde experimentar a esse respeito mais enfado do que arrependimento verdadeiro. E esse tom o condena.
 Meursault, para mim, não é portanto um arruinado, mas um homem pobre e nu, amante do sol que não deixa sombra. Longe de ser privado de toda sensibilidade, uma paixão profunda, porque tenaz, o anima, a paixão do absoluto e da verdade. Trata-se de uma verdade ainda negativa, a verdade de ser e de sentir, mas sem a qual nenhuma conquista sobre si jamais será possível.
Não seria errôneo, portanto, ler em O Estrangeiro a história de um homem que, sem nenhuma atitude heroica, aceita morrer pela verdade.